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Feuilles de palmiers
Poème :
Le ciel est par dessus le toit
le toit
C'est le
6ème poème de la partie III de "Sagesse"
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme!
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.
La cloche, dans le ciel qu'on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l'arbre qu'on voit,
Chante sa plainte.
Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.
- Qu'as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ? |
Plan
de commentaire
Verlaine a été condamné à deux ans de prison.
Le voici qui médite dans la solitude à Bruxelles avant son
transfert à la prison de Mons en Belgique.
I-La fenêtre
Le regard du narrateur bute constamment sur des obstacles, le toit,
l'arbre même s'il s'efforce de les contourner en levant les
yeux ou en faisant appel à son interprétation " cette
rumeur vient de la ville ". L'horizon figé, pris entre des
lignes verticales (l'arbre) et horizontales (le toit) suppose un immobilisme
forcé du poète. C'est une vision restrictive qui procède
par plans successifs et s'accroche aux détails, le toit et non
les maisons, la palme et non la branche. L'alternance des articles définis
et indéfinis le ciel, un arbre, la cloche,
un oiseau reproduit le va et vient d'un regard qui passe du concret à
l'abstrait (le ciel, la cloche, la rumeur) d'un plan éloigné
à un plan rapproché (l'arbre). Le poète n'a pas d'autres
repères que ces trois éléments, le ciel, le toit,
l'arbre.
III- La palme
Dans ce décor réduit à quelques découpes symboliques,
la palme et le mouvement berceur qui s'y rattache font figure d'emblème.
Le rythme du poème est à l'image du balancement de cette
feuille. Le rythme 8/4 imprime une respiration particulière
au poème par des effets d'impulsion (8) et d'amorti (4). Le mouvement
d'amorti est accentué par l'effet de sourdine inhérent au
" e " muet (calme, palme, tinte, plainte).
Le rythme fluide est modulé par les allitérations feutrées
en s (ciel, si bleu, si calme) et l'écho assourdi des sonorités
en " on ", " an ", " in " (qu'on, tinte,
chante). le ciel bleu et calme renvoie à un univers limpide, transparent
étrange dans les paysages Verlainien beaucoup plus sombres et traduisant
généralement une angoisse.
III- Les larmes
Le malaise qui se cachait derrière le ciel si bleu et si calme
(trop bleu, trop calme), la plainte de l'oiseau et l'immobilisme
anormal du paysage trouve son dénouement dans les deux dernières
strophes à travers trois thèmes liés , l'exclusion, le remords et les larmes. L'exclusion était déjà
présente de façon suggestive dans la première strophe
avec un horizon limité à un pan de ciel. On suppose que
le poète se trouve dans un lieu fermé, isolé. L'exclusion
devient explicite avec la répétition de l'adverbe de lieu
" là " désignant un ailleurs à la fois proche et inaccessible. Cet ailleurs est d'autant plus proche qu'il
porte un nom " la ville " et qu'il a une existence sonore, " la rumeur ". Cet ailleurs, ce " la-bas ", qui se
définit par des termes positifs " la vie ", " calme
", " simple ", "tranquille", " paisible",
renvoie implicitement à un " ici " négatif non formulé explicitement comme l'univers carcéral.
" la vie " qui suit son cours de l'autre côté du
toit n'a de réalité que par rapport à l'univers morbide
et cloisonné du poète prisonnier, de même que
sa douleur sereine n'a de valeur que par rapport au tumulte qui l'habite.
Verlaine se prend directement à parti " qu'as-tu fait,
ô toi que voilà " et se juge sans complaisance responsable
de son bonheur perdu.
Conclusion
Ce poème est le regard lucide d'un homme conscient de sa faiblesse et qui confesse sans indulgence son âme qu'il connaît
trop bien. Les larmes excluent toute idée de révolte
et d'action au profit d'une passivité complaisante. C'est une poésie
du remords et de l'aspiration à la liberté marquée
par la pudeur et le dépouillement à travers la pureté
de lignes et de sonorités dont Verlaine ne conserve que les impressions.
Situation
du poème
Verlaine se marie en 1870, au rêve pur des fiançailles succèdent
presque tout de suite des malentendus conjugaux. Pendant la guerre de
1870, Verlaine qui sert dans la garde mobile retrouve d'anciennes habitude.
Il se lie avec Rimbaud et parcourt avec lui La Belgique et l'Angleterre.
En juillet 1873, il tire sur son ami deux coup de revolver et va
purger deux ans de prison à Mons. Il apprend dans sa cellule que
sa jeune femme a obtenu la séparation. Ébranlé, il
devient un chrétien ardent. Romances sans paroles et Sagesse
témoignent de sa conversion.
Sagesse dont fait partie Le ciel est par dessus le toit a été
publié en 1881 et comprend des textes écrits en prison ou
après. Dans ce poème Verlaine fait un retour sur son passé.
Mais à la date où parait Sagesse, Verlaine est retombé
dans ses errements d'autrefois. Verlaine va alors osciller entre vertu
et péché, chair et esprit, ce sera Jadis et Naguère.
Liste des poèmes de Sagesse
Préface de la première édition
I
I-Bon chevalier masqué ...
II-J'avais peiné comme Sisyphe ...
III-Qu'en dis-tu, voyageur, ...
IV-Malheureux ! Tous les dons, ...
V-Beauté des femmes, ...
VI-Ô vous, comme un qui boite ...
VII-Les faux beaux jours .. .
VIII-La vie humble ...
IX-Sagesse d'un Louis Racine, ...
X-Non. Il fut gallican, ...
XI- Petits amis qui sûtes ...
XII-Or, vous voici promus, ...
XIII-Prince mort en soldat ...
XIV-Vous reviendrez bientôt, ...
XV-On n'offense que Dieu ...
XVI-Écoutez la chanson ...
XVII-Les chères mains ...
XVIII-Et j'ai revu l'enfant unique ...
XIX-Voix de l'Orgueil ...
XX-L'ennemi se déguise ...
XXI-Va ton chemin ...
XXII-Pourquoi triste, ô mon âme ...
XXIII-Né l'enfant ...
XXIV-L'âme antique était rude ...
II
I-Ô mon Dieu ...
II-Je ne veux plus aimer ...
III-Vous êtes calme, ...
IV-1-Mon Dieu m'a dit ...
IV-2-J'ai répondu : " Seigneur, ...
IV-3-Il faut m'aimer ! ...
IV-4-Seigneur, c'est trop ! ...
IV-5-Il faut m'aimer. Je suis ces Fous ...
IV-6-Seigneur, j'ai peur...
IV-7-Certes, si tu le veux mériter ...
IV-8-Ah ! Seigneur, qu'ai-je ? ...
IV-9-Pauvre âme, c'est cela !
III
I-Désormais le Sage ...
II-Du fond du grabat ...
III-L'espoir luit comme ...
IV-Gaspard Hauser chante ...
V-Un grand sommeil noir ...
VI-Le ciel est, par-dessus le toit
VII-Je ne sais pourquoi ...
VIII-Parfums, couleurs, ...
IX-Le son du cor s'afflige ...
X-La tristesse, la langueur ...
XI-La bise se rue à travers ...
XII-Vous voilà, vous voilà, ...
XIII-L'échelonnement des haies ...
XIV-L'immensité de l'humanité ...
XV-La mer est plus belle ...
XVI-La " grande ville " ...
XVII-Tournez, tournez, bons c hevaux de bois,..
XVIII-Toutes les amours de la terre ...
XIX-Sainte Thérèse veut ...
XX-Parisien mon frère ...
XXI-C'est la fête du blé, ...
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